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Le groupe du « Fab4 » c'est 12 participants âgés de 15 à 25 ans qui, le temps d'un stage de découverte des métiers de la musique et de la scène, s'initie à l’ingénierie du son, de la lumière, de la musique assistée par ordinateur et du journalisme musical. Nul besoin d’avoir de prérequis en la matière, ce stage se destine à celles et ceux qui souhaitent étancher leur curiosité, rencontrer des professionnels du spectacle et bien sûr des artistes...

« Faut vraiment se motiver pour prendre L’Objet comme nom de groupe »

Par les stagiaires du Fab4 Publié le 27/10/2016

La moindre des choses quand on interview un groupe de Kraut-Rock c’est, d’une, ne pas se prendre le chou, et, deux, aller à l’essentiel. Comme les titres des musiques et des disques de L’Objet.

Vous êtes très peu bavards dans votre musique. Comment abordez-vous l’exercice de l’interview où vous êtes obligés de parler ?

Arnaud : Pour être franc, c’est un exercice où l’on n’est pas très à l’aise mais on est très heureux d’en faire une avec vous !

Votre bio commence d’abord par une revue de presse. Est-ce plus facile d’être décrit que de se décrire ?

Julien : Je trouve que c’est plus facile d’être décrit. Pour évoquer notre univers musical, je préfère réutiliser un article qui a été fait sur nous.

Arnaud : C’est vrai que lorsque l’on rédige de notre propre chef une description du disque que l’on s’apprête à sortir, on reste assez descriptifs et factuels. On met l’accent sur le matériel utilisé, les influences, les courants qu’on emprunte. Il n’y a aucun lyrisme dans la façon d’écrire sur notre propre musique.

Beaucoup d’entre nous ne connaissaient pas le Kraut-Rock avant de vous découvrir. Pouvez-vous nous faire un petit tuto ?

Julien : « Kraut », en allemand, ça veut dire chou. C’est un courant du rock qui est né en Allemagne dans les années 70 et les anglo-saxons, de façon péjorative, ont appelé ça le Kraut-Rock, le « rock choucroute » et c’est resté. Je pense que dans notre façon d’aborder la musique, nous sommes pas mal influencés par ce courant, instrumental et répétitif.

La fumée sur la pochette de votre disque « Toucan » est-elle un moyen de vous cacher et de brouiller les pistes ?

Julien : Inconsciemment, il y a sûrement quelque chose qui relève de ça. Quand on l’a choisie, ce qui me plaisait, c’était que cette fumée bouchait l’image et qu’il fallait imaginer tout ce qu’il y avait hors-champ.

Cette image est extraite du film « Phase IV » de Saul Bass. Avez-vous écrit le disque après avoir vu le film ?

Arnaud : Julien et moi avons travaillé il y a quatre ans sur un ciné-concert. C’était une commande de la Ferme d’en Haut à Villeneuve d’Ascq. On a cherché un film avec le programmateur qui, comme nous, est un passionné de cinéma. Ça fait partie des choses qui doivent, d’une certaine manière, nourrir notre travail. On a donc créé un ciné-concert autour de « Phase IV » dont une image isolée, on appelle ça un photogramme, a ressurgi deux ans après quand on cherchait un visuel pour notre disque Toucan.

Dans ce film, des scientifiques essaient d’intercepter un message. Est-ce que pour vous la musique est un moyen de faire passer un ou des messages ?

Julien : C’est un langage, une façon de communiquer avec les gens. Mais cette communication doit-elle nécessairement passer par un message fort ? Non, c’est juste un moment d’échange entre un artiste et son public.

Arnaud : Vu la musique qu’on fait, c’est évident que L’Objet n’a aucun message politique. Le seul message que je peux voir, c’est que nos disques, je leur mets un point final parce qu’à un moment donné, je sais que j’ai envie de les écouter.

Y a-t-il un réalisateur avec qui vous rêvez de collaborer ?

Julien : Si l’on devait faire une musique de film en France, moi, j’aime bien Alain Guiraudie mais je ne sais pas si notre musique correspond à ce qu’il fait.

Gaspard Noé ?

Arnaud : Oui, pourquoi pas. Un bon film d’Olivier Assayas aussi, je ne dis pas non.

Êtes-vous les seuls à vous appeler l’Objet ?

Julien : On espère être les seuls.

Arnaud : « The Object » existe aussi il me semble. Mais il faut dire que L’Objet, c’est pas un nom de groupe incroyable, faut vraiment se motiver pour prendre un nom comme ça. Je pense pas que ça risque de se reproduire.

Nous avons découvert que le bec du toucan permettait d’augmenter sa température de 10 degrés. Pensez-vous que la musique serve à réchauffer les gens ?

Arnaud : Nous, on chauffe beaucoup sur scène en tous cas !

Julien : Et on se régule aussi ! Du fait qu’il n’y ait pas de chant et que l’on vient aussi du post-rock, je pense qu’on doit avoir un rendu plus froid que chaud.

Arnaud : Oh, je ne suis pas sûr d’être d’accord avec toi.

Olivier : Ça dépend des concerts. Récemment, on a joué en mode électro avec un public ultra-réceptif. On a joué plus vite que d’habitude, c’était très vivant. Et parfois, on donne des concerts plutôt froids.

Arnaud : On ne joue pas très souvent. On aimerait le faire un peu plus mais on joue uniquement sur des sollicitations qui nous intéressent vraiment. Etant donné qu’il peut nous arriver de ne pas jouer pendant plusieurs mois, on peut perdre le rythme et revenir sur scène avec un petit manque d’aisance qui peut alors passer pour quelque chose de froid. Mais la musique, j’en suis convaincu, n’est pas du tout froide.

Comment fait-on pour vivre de la musique ?

Julien : On n’en vit pas … à part Olivier !

Olivier : Je ne vis pas de L’Objet, je vis de plusieurs projets musicaux. Vivre d’un seul projet, c’est impossible, en tous cas pas avec le genre de musique que l’on fait. Pour réussir à vivre de la musique, il faut toujours être à l’affût et se diversifier au maximum. Quand une date s’annule, il faut rebondir pour en trouver une autre et conserver son statut d’intermittent.

Julien : A moins d’avoir un énorme succès à un moment précis.

Olivier : Oui mais dans le meilleur des cas, tu en vis pendant deux ans maximum... Il faut toujours anticiper.

Une de vos musiques s’appelle Abidjan. Êtes-vous déjà allés en Côte d’Ivoire ?

Julien : Absolument pas !

Arnaud : J’adorerais aller me balader en Afrique mais non désolé, on n’y est jamais allés. Tu voulais peut-être savoir pourquoi on avait appelé cette chanson Abidjan ?

Non, on voulait savoir en quoi le voyage était lié au métier d’artiste ?

Arnaud : Ah, c’est une question plus intéressante !

Julien : Ça tombe bien parce que vous avez affaire à deux individus très différents. Arnaud a voyagé énormément et moi, presque pas, et ça donne les disques de L’Objet. On s’est aperçus qu’il y avait dans notre musique un peu de sonorités et des rythmiques africaines, je crois que l’idée du titre Abidjan vient de là.

Arnaud : Quand on crée de la musique, on ne se dit pas qu’on va faire l’effort de se projeter à Abidjan et composer un morceau avec ça en point de mire. On aime bien laisser s’étirer les motifs musicaux répétitifs, travailler sur des choses hypnotiques et après, à l’écoute, après s’être amusés à cumuler plein de couches, quand on se retrouve avec un morceau de huit minutes qui nous plait, alors oui, seulement après, on peut l’écouter en se disant que ça nous fait voyager.

Habituellement, dans la musique, les instruments accompagnent les voix. Chez L’Objet, c’est l’inverse.

Arnaud : Exactement. La voix est utilisée comme un instrument.

Olivier : Comme des nappes.

Arnaud : Comme des nappes bourrées d’effets. Il y a du chant et du texte mais je mets au défi quiconque de comprendre ce que chante Julien.

Julien : Même moi, je ne suis pas sûr de comprendre ! Disons que le texte n’a pas d’importance, il apporte juste une autre sonorité complémentaire aux guitares, aux claviers et aux batteries.

Olivier : Ça humanise un peu la musique. On fait toujours en sorte de garder un ou deux morceaux avec de la voix pour les concerts.

Garderez-vous toujours cette même approche minimaliste ?

Arnaud : Je crains que oui. Je dis ça parce que, des fois, j’ai peur qu’on reste un peu coincés là-dedans. Mais même si le minimalisme reste présent, je pense que notre musique gardera toujours une certaine richesse.

Quels sont les projets de l’Objet ?

Julien : On s’est doucement remis à composer. On imagine refaire de nouveaux enregistrements et, pourquoi pas, faire un nouveau disque d’ici un ou deux ans.

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